Par Dr Laurent BOUHANNA (Vétérinaire spécialiste en ophtalmologie à Paris)
Le glaucome aigu chez les carnivores domestiques doit être considéré comme une urgence. L’hospitalisation de l’animal est recommandée pour un traitement parentéral en première intention. De nouveaux collyres ont récemment été mis sur le marché, favorisant la baisse de la Pression Intra-Oculaire (PIO). Voici un point sur les aspects thérapeutiques actuels du glaucome.
Les symptômes les plus classiques d’un glaucome sont une rougeur de l’oeil, une douleur, une mydriase et un oedème cornéen plus ou moins marqué (Photo 1)
Dans la plupart des cas, le glaucome conduit à la cécité de l’oeil atteint, ainsi qu’à une buphtalmie, définie comme une augmentation du volume du globe oculaire.
La mesure de la pression intra-oculaire – ou PIO – est le moyen le plus fiable de confirmer le glaucome. Cette mesure se réalise au moyen d’un Tonomètre de Schiötz ou d’un Tonopen (Photos 2 et 3).
Lorsque le PIO est supérieure a 20 mm de mercure chez le chien et de 25 mm de Hg chez le chat, on peut parler de glaucome.
Il convient d’examiner l’oeil controlatéral en effectuant une gonioscopie (examen de l’angle irido-cornéen).
Hospitaliser une journée lors de glaucome aigu
Le glaucome aigu est une urgence, dans la mesure ou il peut conduire a une cécité rapide et irréversible. Les objectifs du traitement sont de supprimer la douleur, de conserver la vision et d’éviter les complications associées. Les objectifs thérapeutiques sont également d’ordre esthétique pour le maître.
Le traitement médical du glaucome aigu impose d’hospitaliser l’animal une journée :
- En première intention, on peut instiller dans l’oeil atteint une goutte de Xalatan collyre R (principe actif : latanoprost), un produit récent particulièrement efficace et puissant, d’action rapide malgré son cout élevé.
- Une perfusion intra-veineuse de Mannitol 20% (1 a 2 g/kg, sur 30 minutes) est ensuite indiquée, ainsi que
- l’administration de 10 mg/kg en intra-veineux de Diamox R, un inhibiteur de l’anhydrase carbonique. Les effets secondaires du Diamox R ne sont cependant pas a négliger : vomissements, diarrhées et acidose sont en effet fréquents.
Le traitement se poursuit ensuite chez le propriétaire auquel le praticien aura prescrit : Timpilo 2 collyre R (association de Timoptol et de Pilocarpine) et de Trusopt collyre R 4 fois par jour, de Xalatan collyre R 1 fois par jour, le soir auxquels on peut associer éventuellement du Diamox R en comprimés à la dose de 5 mg/kg/jour en 2 prises, en fonction des effets secondaires observés ou non.
Un contrôle sera effectué à 48 heures, puis à une semaine.
Traiter les glaucomes secondaires
Lors de glaucome secondaire à une uvéite (uvéite dite alors « hypertensive »), on conseille l’injection sous-conjonctivale de corticoides et l’instillation de Béta-Septigen collyre R et de Trusopt collyre R, 3 fois par jour chacun, qui permettent de diminuer l’inflammation oculaire et de diminuer la PIO (Photo 6).
Lorsque c’est une luxation antérieure du cristallin qui a provoqué le glaucome, la chirurgie est la mieux indiquée, on préconise de réaliser une extraction intra-capsulaire du cristallin.
Enfin, des tumeurs des corps ciliaires – qui déforment souvent la pupille – peuvent provoquer un glaucome d’origine secondaire (Photo 7). Dans ces cas, l’énucléation est l’alternative à privilégier.
Suivre l’évolution de la pression intra-oculaire
Lorsque la pression intra-oculaire redescend en dessous de 20 mm de mercure, on considère que l’animal répond bien au traitement entrepris. Dans ce cas, il importe de poursuivre le traitement à base de collyre (Timpilo 2 collyre R et Trusopt collyre R 3 fois par jour, Xalatan collyre R 1 fois par jour, le soir) et d’effectuer un contrôle un mois plus tard.
En prévention, il convient de traiter également l’oeil contro-latéral. Le Timpilo 2 collyre R sera ainsi instillé 2 fois par jour, tout au long de la vie de l’animal.
Lors d’échappement au traitement médical : le traitement chirurgical au laser est intéressant.
Lorsqu’il y a échappement au traitement médical, la pression intra-oculaire remonte au dessus de 25 mm de mercure. Dans ce cas, si le praticien pense qu’il a des chances de sauver la vision de l’animal, il peut entreprendre un traitement chirurgical au laser (Photos 8 et 9).
Le principe de l’intervention est d’induire par l’énergie du laser une destruction partielle des corps ciliaires de façon à diminuer la production d’humeur aqueuse.
Dans les cas les plus avancés ou les symptômes sont graves et irréversibles, avec la présence d’une buphtalmie notamment, les chances de récupérer la vision sont moindres. Dans ces cas très avancés, on préconise l’énucléation ou la mise en place d’une prothèse intra-oculaire (Photo 10).